Trois songes [Un procès de Socrate]

Qu’est-ce qu’une vie heureuse ? Qu’est-ce qu’une existence qui vaut la peine d’être vécue ? Qu’est-ce que la justice ? Que sommes-nous prêts à sacrifier pour elle ? Ce spectacle nous met face aux questions que Socrate adressait aux Athéniens lors de son procès en 399 avant J.-C. Des questions qui ne nous laissent pas tranquilles : matière à réfléchir la démocratie, ses institutions.

A travers trois songes, deux acteurs se prêtent au jeu socratique. Tour à tour maître et disciple, Socrate ou son double, ils renversent les rôles (du philosophe, du politicien, du religieux) pour examiner les rapports qui fondent la cité. Pas de piédestal, ni estrade pour dominer l’assemblée du public, ils dialoguent au milieu des spectateurs et nous emmènent avec bonheur sur les chemins de la pensée.

Poudre noire

Fantômes, êtes-vous là ? Oui, répond Magali Mougel, auteure d’une pièce que Simon Delattre, metteur en scène, adresse à tous mais plus particulièrement au public adolescent. Pourquoi ? Parce que l’adolescence, c’est ce moment de trouble où l’on quitte l’enfance pour pénétrer le monde des adultes, laissant derrière soi des spectres qui soudain encombrent. Et puis parce que l’héroïne du spectacle est elle-même une ado dont la mère vit cernée par des ombres.

Sur le plateau, près des acteurs, un marionnettiste fait surgir ou disparaître des formes géantes, des présences impalpables ouvrant le théâtre à l’onirisme et à l’étrange.

From The Ground To The Cloud

On nous l’annonce régulièrement à la une des magazines, nous sommes entrés dans l’ère des « big data ». La production industrielle, les échanges entre individus, la culture sont informatisés depuis longtemps déjà, mais avec l’arrivée des objets connectés et des nanotechnologies, l’informatique entre dans nos corps, dans nos maisons, dans nos villes… Les frontières s’effacent. Tout interagit avec tout en permanence, tout fait partie du cloud, et le cloud fait partie de tout. Alors, pourquoi ne pas mettre le cloud sur les planches, aussi paradoxal que cela puisse paraître ?

Christophe Dellocque fait sa Sylvie Joly

Quel fil invisible relie depuis l’enfance le comédien Christophe Dellocque à Sylvie Joly, cette virtuose du rire à l’humour noir dont l’incroyable choucroute blonde et la bouche soulignée de rouge l’ont marqué pour toujours ? Sans caricature ni travestissement, Christophe Dellocque s’approprie le répertoire de cette inconnue aimée qu’il n’a jamais rencontrée et en joue les personnages devenus cultes : bourgeoisies arrogantes et névrosées, gourdes décervelées, bobos frustrés, artistes incompris…

En faisant « SA Sylvie Joly », Christophe Dellocque nous dévoile son parcours sur les traces de cette grande dame qui a ouvert la voie du one-woman show. Un régal pour les aficionados, une découverte réjouissante pour les autres !

Un mois à la campagne

Alain Françon dirige les comédiens en chef d’orchestre inspiré et inspirant. Grâce à lui, les acteurs se métamorphosent en stradivarius. Il sait tirer d’eux les sons les plus beaux, les plus purs. Emouvants, incarnés, bouleversants, les comédiens respirent avec leurs personnages, ils parlent au même rythme, avancent au même pas. Grand spécialiste de Tchekhov, le metteur en scène poursuit avec sa troupe son exploration de l’âme russe et crée Un mois à la campagne, d’Ivan Tourgueniev.

Une pièce bucolique et sublime qui s’aventure au cœur des tourments amoureux et déploie le portrait d’une femme de trente ans, aveuglée par sa passion pour un homme plus jeune. Un drame poignant.

Bluebird

Londres. Il est tard. Jimmy roule au volant de son taxi. La nuit se prête aux confidences. Les clients se racontent. Chacun mène Jimmy un peu plus près de son but : retrouver une femme, Clare, qu’il n’a pas vue depuis cinq ans. Ne disons rien de la fin du périple ni des raisons qui ont brisé ce couple qui s’aimait. La tragédie est là, en embuscade, elle se fera entendre.

Mais levons le voile sur l’émotion qui gagne le spectateur à mesure que les kilomètres défilent. Cette émotion, Philippe Torreton, acteur phare de la représentation, la porte au point d’incandescence. Comme seuls savent le faire les comédiens dont le combustible premier est leur profonde humanité.

Mon fric

Voici l’histoire de Moi, une vie racontée à travers sa relation à l’argent. Ça commence lorsque Moi est enfant en 1972, avec l’URSS et déjà le rock. Jusqu’à sa vieillesse en 2040, on voit défiler le chanteur Renaud, l’Inde, un vendeur de chez Darty, Georges Bataille, les spectres du marxisme, l’avènement du libéralisme, l’espoir des économies alternatives… Autour de Moi sont réunis tous les personnages d’une vie, passant subrepticement leur tête pour lâcher une ou deux répliques sur le fric.

David Lescot déplie ici les feuilles d’un théâtre choral, drôle et trépidant. Dans l’esprit d’une BD, il croque les détails, les mots, les gestes qui montrent combien l’argent en dit long sur nous, sur notre vie. L’argent qui file, le temps qui passe, et Moi, et Moi et Moi…

Master

Un cours de rap qui a déjà pas mal fait parler de lui la saison passée. Rattrapage pour tous ! A l’école, on étudie son histoire, ses œuvres majeures, ses grands noms, ses dates, ses principales batailles… La théorie comme la pratique. Dans ce face-à-face professeur-élève, l’examen menace de tourner à l’affrontement, ou carrément à la battle, ou même pire au clash.

Assis dans cette salle de classe, sommes-nous spectateurs ou élèves ? L’irruption du rap interroge notre rapport à l’autorité et à l’Histoire. Devenu incontournable dans les collèges et lycées, il est désormais partout et transgénérationnel. David Lescot et Jean-Pierre Baro s’amusent à nous raconter une Histoire de France méconnue.

Elle pas princesse Lui pas héros

Les spectateurs sont divisés en deux groupes. Ils sont guidés par un acteur d’un côté, une actrice de l’autre dans deux espaces : deux coins de la bibliothèque, de la salle polyvalente, de l’école.

Chaque groupe a rendez-vous avec un personnage qui va raconter son histoire. Cela commence pour lui par : « J’aurais voulu être une fille » et pour elle « mes parents rêvaient d’avoir un garçon ». Deux histoires donc, qui recèlent un tas d’autres histoires où il est question de goûts, de préférences, de rôles à jouer, de place à tenir quand on est un garçon ou une fille. A l’entracte, les groupes inversent et les spectateurs rencontrent l’autre personnage.Des histoires qui se regardent et s’assemblent comme un puzzle pour mieux déconstruire les clichés et stéréotypes sur l’identité.

L’Imparfait

Victor sait très bien comment faire le bonheur de ses parents. Mais un jour, il commence à se poser des questions. Se pourrait-il qu’il ne soit pas si parfait que cela ? Alors, Victor se met à dépasser les limites de ses coloriages… et du reste. Ses parents, en désespoir de cause, font l’acquisition d’un enfant-robot, sensé prôner l’exemple auprès de leur fils. Ceux-ci pourront-ils supporter longtemps un enfant qui ne pense et n’agit qu’à travers eux-mêmes ?

Dans ce spectacle où l’humour flirte avec l’absurde, Olivier Balazuc nous invite à méditer sur le culte de la performance de notre monde contemporain : et si la « vraie » vie se conjuguait à « l’imparfait » ?