Dans un espace circulaire propice à l’intimité, se font entendre les premières mesures du Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy… Alors, le vent se lève, emportant avec lui un amas de petits sacs plastiques endormis. Comme par magie, ces marionnettes sans fil, légères comme les nuages, s’envolent, tournoient, s’épanouissent dans l’espace en mille variations.
Dans le cercle de cette piste aux étoiles, une sorte de prêtresse du vent officie : elle accouche les formes et les couleurs, les accueille sur son épaule comme des oiseaux, accompagne leur combat. Phia Ménard qui, depuis près de vingt ans, jongle avec l’injonglable, se confie ici au vent. Elle nous emmène dans une danse joyeuse et hypnotique.
Au centre d’un petit cirque, se joue le drame sans parole d’un être en pleine mutation. Sous combien de couches nous couvrons-nous pour paraître au monde ? Comment échapper à l’emprise des artifices pour laisser paraître ce que nous sommes ? Un être mystérieux va progressivement se dévoiler, se dépouiller des membranes successives qui le recouvrent, des formes vont s’élever dans les airs et s’animer comme on l’a rarement vu.
L’exploration des matières instables et éphémères est la spécialité de Phia Ménard. Elle nous invite à une danse aussi sublime qu’éphémère contre les vents. C’est beau, déroutant, à la fois sublime et glaçant… Une expérience aux frontières du rêve et du réel. Un spectacle qui atteint une rare intensité.
Meaulnes surgit dans la vie monotone du jeune écolier François Seurel. Fasciné par ce nouvel ami, il se jette avec lui sur les chemins de l’aventure en quête d’une « fête étrange », dont Meaulnes a été le témoin lors de sa fugue vers le « domaine mystérieux ». Dans cette très libre adaptation du roman culte d’Alain-Fournier, les blouses d’antan et les chapeaux de fête se sont changés en projections et mapping vidéo. À la manière d’une chasse au trésor, on embarque à la suite des personnages, et le roman commence lui aussi une vie nouvelle.
Car adapter Le Grand Meaulnes, c’est courir le risque de se confronter à ses errances, ses mystères, ses énigmes. Comment passe-t-on d’une page de roman à une scène de théâtre ? Entre respect du texte et improvisations, les acteurs nous entraînent dans une relecture sensible et ludique de ce roman d’aventures intérieures.
La Traviata est l’un des opéras les plus célèbres. La musique de Verdi, le livret de Francesco Maria Plave inspiré de La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas fils, l’interprétation inoubliable de Maria Callas participent de sa légende. Le destin de cette courtisane dévoyée, son histoire d’amour avec le fils d’un grand bourgeois continuent de nous toucher. Cette longue fête qui se conclut dans la ruine et la mort nous fascine encore par la beauté de ses excès.
Dans le même espace, les musiciens mêlés aux chanteurs-acteurs explorent la fougue lyrique de Verdi autant qu’ils incarnent les personnages de La Dame aux camélias. De cet entrelacement des œuvres, naît un jeu entre le parlé et le chanté, entre le français et l’italien. L’occasion pour les acteurs de se mettre à chanter pour dire plus, pour dire autrement, pour dire autre chose.
Imaginez un plancher suspendu, en perpétuel mouvement : balançoire improbable, trapèze, tourniquet… Ce dispositif entraîne dans sa course folle six individus. Désorientés et ivres de vertige, ils redoublent de prouesses acrobatiques pour dompter ce sol qui ne cesse de se dérober. Tout proches d’eux, au plus près du risque, à glisser, à se laisser porter, ramasser, rouler… on rit et on tremble.
« Ce n’est pas parce qu’on ne parle pas sur scène que ce que l’on fait n’est pas parlant ! » Yoann Bourgeois
Tout débute dans un garage de la banlieue de Montréal. Tandis que Suzanne laisse tourner le moteur de sa voiture, commence un voyage dans ses souvenirs vers le Grand Nord québecois. Vanishing Point, c’est le point de fuite ou le point de rencontre de trois personnages en quête d’amour. Leurs histoires s’enchevêtrent sur fond de légendes amérindiennes et d’airs blues-rock-country des musiciens de Moriarty.
Avez-vous déjà parcouru, au cours d’un spectacle, des milliers de kilomètres, traversé des forêts, longé des lacs gelés, bravé une tempête au côté d’un inconnu ? Par un dispositif cinématographique inventif, Marc Lainé nous place au cœur d’un voyage immobile. Par la magie des mots, des images et des sons, il nous embarque là où le réel et le mythe se croisent, où la vie et la mort se frôlent.
Un rideau de pluie, fait de fines cordelettes, encercle les dix danseurs. Au sol, on devine le tracé de parcours géométriques. La pièce se développe en variations, en canons, en miroirs. Elle part d’une simple marche, puis le mouvement trouve mille façons de ricocher d’un corps à l’autre. Poussés par les vagues rythmiques de la musique, les danseurs s’abandonnent à une irrépressible énergie collective…
Rain est tendu sur la partition de Steve Reich. Music For 18 Musicians est l’une des œuvres musicales les plus séduisantes du xxe siècle : claire, ample et vertigineuse. Sous nos yeux, la musique donne naissance à une danse jubilatoire, pulsionnelle. Un choc esthétique et émotionnel ! Après Rain, le déluge…
Maëlle Poésy s’inspire d’un roman du Prix Nobel de littérature José Saramago pour nous emmener dans une étonnante fiction politique. Entre conte fantastique et comédie noire.
Étoile montante du théâtre français, programmée au 70e Festival d’Avignon et à la Comédie française à l’automne, Maëlle Poésy interroge ici la démocratie et le pouvoir. À travers une situation fantastique qu’elle pousse à son paroxysme, elle convoque un réalisme magique mêlant théâtre, danse, musique et vidéo. Pour nous mettre face à la fragilité d’un système qu’on croyait immuable.
On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Les acrobates de la compagnie Casus viennent nous prouver le contraire. Ils marchent sur des œufs, caracolent au trapèze comme en apesanteur, s’escaladent pour former des totems humains… Multipliant défis et prouesses, ces quatre artistes font de leur corps un spectaculaire moyen d’expression.
Avec eux, c’est un minimum d’artifices pour un maximum d’effets ! Ces quatre mousquetaires renversent les codes du cirque traditionnel pour l’emmener vers l’épure et la poésie. Dans un spectacle riche en trouvailles, ils nous bluffent avec des numéros que l’on croit connaître et qu’ils réinventent pour le plaisir des petits et des grands. Avec eux, on retient notre souffle. On frissonne. On est dans le cirque jusqu’au cou !